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Une opposition divisée laisse à M. Macron une fenêtre d'opportunité pour lancer ses réformes

Et ce, en dépit d'une cote de popularité en chute libre

La cote de popularité en chute libre d’Emmanuel Macron est un rappel à la réalité: sa jeunesse et le poids de sa victoire à l’élection présidentielle n’ont pas suffi à lui obtenir un soutien pour ses réformes en faveur de l'entreprenariat en France. M. Macron a dévoilé un projet de loi controversé sur le travail qui pourrait lui valoir une impopularité à long terme.

Selon l'Ifop, seulement 40 % des Français admettent soutenir le président, moins que les 64 % du lendemain de sa victoire en mai contre la candidate d’extrême-droite Marine Le Pen. Cette perte de soutien trahit la base électorale réduite de M. Macron. Passée l’euphorie post-électorale, il éprouve des difficultés à établir une relation avec d’autres catégories de population que les intellectuels et les libéraux à hauts revenus qui forment son socle électoral. Les pro-entreprises et pro-européens constituaient moins d’un quart des suffrages exprimés lors du premier tour des élections.

Malgré cette faible base de soutien, M. Macron a mené une campagne électorale extraordinaire jusqu’à la présidentielle, à côté de candidats de droite et de gauche défaillants qui en ont fait le candidat le plus credible au centre. ''A cause de circonstances exceptionnelles, Macron n’a pas ressenti le besoin d’élargir sa base électorale lors de sa campagne, à l’inverse de politiciens traditionnels, il n’a pas eu à passer des accords et des compromis'', comme le souligne le politologue de l’Université de Versailles Laurent Bouvet, avant d’ajouter : ''Mais le risque qu’il encourt à présent est de devenir aussi impopulaire que François Hollande''.

Le prédécesseur de M. Macron, M. Hollande, a souffert en son temps d’une cote de popularité très basse avec 13 % d'avis positifs, d’après un sondage de l’Ifop.

Le scepticisme a été renforcé par des mesures favorisant les plus fortunés. Des exemptions fiscales pour les plus aisés, une augmentation des prélèvements pour les retraités et un projet de loi visant à assouplir le marché du travail, ont affaibli son soutien chez les travailleurs souvent précaires et les personnes plus âgées. Alors que la plupart des personnes aisées font confiance au président, seulement 41% des ouvriers le soutiennent, moins que les 52% du mois de juin selon l'institut de sondage Harris Interactive. Moins de la moitié des plus de 50 ans le soutiennent aujourd'hui, alors qu'ils étaient 60% en mai.

Il est vrai que M. Macron pourrait connaître un regain de popularité avec une amélioration de l’économie. Ses efforts diplomatiques visant à imposer des lois européennes plus strictes face aux travailleurs détachés peuvent être vus comme une façon de protéger les travailleurs français de la concurrence transfrontalière et devrait améliorer son image auprès des électeurs ouvriers.

Mais son engagement européen à ramener le déficit de la France sous la barre des 3 % annonce des réductions budgétaires d’autant plus difficiles pour financer les exemptions fiscales de l’année prochaine destinées aux investisseurs et aux sociétés. Le gouvernement a annoncé qu’il lui fallait dénicher 20 milliards d’euros d'économies en 2018. Le budget de l’année prochaine sera précisé au mois de septembre au parlement. ''Cela reflètera de vrais choix'' et s’emploiera à ''briser le cercle vicieux de la dette'', avait annoncé le Premier ministre Edouard Philippe.

A court terme, l’opposition ne devrait pas être un obstacle important, aussi longtemps qu’il n’y a pas d’alternative politique crédible,  souligne M. Bouvet.

L'aile droite de l’UMP, qui devra choisir un nouveau leader au mois de décembre, est partagée entre les conservateurs et les modérés qui se disputent à propos des stratégies à adopter après la calamiteuse campagne du candidat François Fillon. Secoué par des conflits internes, le Front National, le parti d’extrême-droite, ne semble pas trouver une alternative à Mme Le Pen, critiquée à l’intérieur de son parti sur sa position en faveur d’une sortie de la zone euro.

En attendant, le parti socialiste, au centre gauche, est financièrement moribond et a cédé le devant de la scène à une gauche plus orthodoxe. M. Jean-Luc Mélenchon, l’anti capitaliste du parti ''La France insoumise'', qui appelle aux manifestations de masse contre le projet de loi sur le travail, n’empêchera pas le parlement d’adopter ces mesures.

Pour cette raison, M. Macron peut se permettre d’utiliser son capital politique. Il va de l’avant avec des stratégies qui permettent de lancer la réforme des retraites et de l’assurance-chômage cette année et la suivante - deux autres sujets épineux.

Mais il sait également que viendra le moment où il lui faudra réparer son image et se  positionner auprès des travailleurs. Ceci avant les élections européennes en 2019, lorsque le jeune président réformiste fera face à son premier test électoral.